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Algorithmes et goûts musicaux (Les Jours)

acoustic guitar close-up on a beautiful colored background

Tout le monde pense que les machines de l’ombre de Spotify ou Deezer enferment l’auditeur dans ses goûts. Les Jours ont vérifié.

C’est presque un dogme pour les utilisateurs des plateformes de streaming musical, le préalable à toute discussion : celles-ci, à travers les algorithmes de recommandation automatisés, nous enferment dans une écoute confortable, une petite bulle cotonneuse dans laquelle on tournerait en rond au milieu de chansons qui se ressemblent toutes. […]

Pour Jean-Samuel Beuscart, maître de conférences à Télécom Paris, membre de l’étude Records et acteur de la recherche sur l’écoute de la musique en ligne depuis les années Napster, il faut se méfier du mot « découverte ». « Il vient finalement peu dans les entretiens que l’on mène dans cette étude [sur les recommandations automatisées des plateformes]  ; c’est pour décrire [d’ailleurs] un événement vraiment marquant. »

Personne n’utilise le mot “découverte” pour parler de Rosalía ou d’Orelsan, parce qu’on ne  découvre par leur existence sur une plateforme de streaming » , alors que ces artistes sont partout ailleurs dans les médias et sur les réseaux sociaux. « Les moments qui apparaissent importants pour les gens avec qui on a mené des entretiens, qui sont décrits comme ayant de la valeur dans l’expérience musicale, ce sont plutôt des processus d’attachement avec un artiste ou une chanson qui va rester. »

Se dessinent alors deux « épreuves pertinentes » pour un nouveau titre entendu sur une plateforme de streaming, selon le sociologue : « Soit il va bien dans le flux de musique adaptée à mon moment, pour travailler ou me filer la pêche, soit il est pertinent parce que je m’y attache et que j’apprends quelque chose. On s’attache à ce que fait une chanson, ce qu’elle évoque dans notre vie. » Cela « suggère donc que l’algorithme joue un rôle dans la construction de l’attachement, en proposant des chansons qui vont ensuite être glissées dans le répertoire d’une personne » , ses playlists personnelles. Celles qui matérialisent dans le monde du streaming ce processus d’attachement, comme on le faisait avant en rangeant des disques sur une étagère. Bien plus que les sélections mises en avant par les plateformes, ce sont ces playlists personnelles que l’on écoute et réécoute, et qui forment le cœur de notre monde musical actuel où nous utilisons plus l’algorithme qu’il ne se sert de nous.

Image d’entête source Pvprod/Freepik