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Le mythe de l’IA « magique » cache un travail humain colossal (La Croix)

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Clément Le Ludec & Maxime Cornet, doctorants à Télécom Paris (source The Conversation)

Maxime Cornet et Clément Le Ludec, doctorants en sociologie à Télécom Paris, ont enquêté sur les « travailleurs du clic » à Madagascar. Chargés d’assurer la lisibilité des données ingérées par des modèles d’intelligence artificielle (IA), ils contredisent le fantasme d’une intelligence artificielle entièrement automatisée.

La Croix : Les progrès de l’intelligence artificielle (IA) font craindre à certains la « fin du travail », qui se verrait à terme automatisé. Votre recherche met plutôt en lumière une précarisation du travail… Laquelle ?

Maxime Cornet : Quand on parle d’IA, on se représente un robot fonctionnant de manière autonome. En réalité, ces systèmes servent à reproduire leurs jeux (ensemble de données) d’entraînement. Pour qu’un ordinateur sache détecter un chat dans une image, il faut lui présenter des milliers d’exemples et lui indiquer à chaque fois où se trouve le chat, en le détourant à la main… Ce travail humain d’annotation de la donnée est colossal, mais indispensable. Car pour un ordinateur, une image n’est qu’un ensemble de pixels !

Clément Le Ludec : Ce qu’on observe à l’heure du numérique, c’est un double déplacement du travail. Vers le consommateur, d’abord, avec la valorisation du travail gratuit. À chaque fois qu’on laisse des « j’aime » ou des commentaires sur Facebook, à chaque fois qu’on coche les cases qui contiennent une moto ou un feu de circulation sur un « Captcha », on produit des données pour l’entraînement de modèles d’IA. Le second déplacement, lui, a lieu vers les pays du « Sud global ».